mercredi 18 mai 2016

Quelques digressions sur l'art roman en Allemagne.

Il m'a semblé que ces prochains billets consacrés à la Souabe étaient l'occasion pour quelques remarques générales ou personnelles sur l'art roman en Allemagne qui reste un pays injustement mal connu ou négligé mais qui est pour moi un véritable chemin de découvertes souvent enthousiasmantes.
Réduire l'art roman à l'Allemagne actuelle est évidement une hérésie car il conviendrait de rétablir dans toute sa diversité l'art roman dans le Saint Empire. Mais le nombre considérable de monuments majestueux à découvrir suffira à la tâche.

Pour reprendre l'expression de Fernand Braudel l'on doit d'abord que cet art est de " longue durée". L'on admet volontiers que c'est avec les premiers empereurs saxons au Xe siècle que l'on doit parler d'art roman ou d'art ottonien qui se poursuivra au delà du milieu du XIIIe siècle alors qu'en France on est déjà à la floraison des grandes cathédrales gothiques.Mais que l'on ne s'y trompe pas il ne s'agit pas d'un art finissant mais bien d'un art roman dans la force de son expression.

Autre trait marquant , l'attachement pour des édifices de plan basilical avec de multiples déclinaisons des transepts; transept continu, transept bas, basiliques à croisées régulières ou sans transept qui sont la marque de l'attachement aux formes paléochrétiennes mais aussi au modèle impérial  ce qui peu laisser à penser à un certain conservatisme de l'art roman en Allemagne.

Il faut aussi noter une particularité singulière de l'art roman en Allemagne celle de de l'emploi du puissant massif occidental ou "Westwerk" souvent dépourvu de tout décor et en écho un goût certain  pour  "l'effet des masses" , des églises à doubles absides occidentales et orientales et les vastes coupoles ainsi que l'accumulation des tours des galeries extérieures et parfois des plans tréflés ou octogonaux...

Saint-Quirin de Neuss
Saint-Quirin de Neus
Sainte-Marie du Capitole Cologne

Ainsi le visiteur français sera t'il surpris de trouver bien peu de ces églises à façades harmoniques comme à Jumièges, Caen ou Reims mais surtout de ces églises à vaste chevet et déambulatoires et chapelles rayonnantes si caractéristiques à l'art français et aux modèles exportés par Cluny dans toute l’Europe du sud . Enfin on y trouvera bien peu de cette sculpture monumentale qui fascine tant les pèlerins de Vezelay, Moissac ou Conques enfin, les chapiteaux historiés sont également rares outre Rhin.
Avec l'usage aussi généralisé de la nef plafonnée et non voûtée, avec cependant quelques exceptions remarquables comme à Spire doit t'on pour autant conclure à une certaine unicité et même "pauvreté" de l'art roman allemand ?
Bien entendu il n'en est rien car l'on reste surpris par la grande variété des édifices des plus grandioses cathédrales au plus modestes chapelles ; mais aussi la puissance et l'harmonie d'un art roman qui sous l'influence d'un empereur très présent développe un sens évident de la majesté et de la grandeur . On est également séduit par le grands nombre d'objet liturgiques, sculptures sur bois, fonts baptismaux ou fontaines et parfois une certaines exubérance de la sculpture qui se libère au chevet des églises.
Saint Nicolas et Saint Médard Brauweiller
Saint-Géréon Cologne



Cathédrale de Spire
Cathédrale de Worms



Cathédrale de Worms




En tant que voyageur insatiable en "art roman " depuis des années, je dois cependant partager une impression que pourront ressentir d'autres voyageurs. En Allemagne les églises romanes peuvent paraître "neuves" et même, osons le mot factices tant elle sont restaurées systématiquement , ré-enduites, repeintes...Chaque pierre érodées semble avoir été remplacée par une copie ce qui ferait presque douter de leur authenticité qui n'est pourtant guère contestable. Il faut donc accepter de composer avec cette impression qui cependant permet d’appréhender  plus exactement ces édifices tels qu'ils devaient être à l'époque médiévale.
Enfin je tiens à souligner le grand plaisir du simple visiteur en Allemagne où les gens sont particulièrement accueillant et sympathiques, je ne mentionnerais ici que le gardien des clefs de l'abbaye de GrossKombourg qui a ouvert pour moi seul cette majestueuse église! Enfin et ce n'est pas négligeable pour qui sait chercher, l’hébergement et la table peuvent être exceptionnels et je conseille particulièrement ces multiples auberges que l'on trouve en particulier dans le massif de la Foret Noire qui redonnent un certain sens au voyage comme une forme de pèlerinage en terre de découvertes.

La plupart des billets que je partagerai seront renseignés de mes sources qui m'ont également aider a préparer le voyage. Malheureusement cette région de l'Allemagne est finalement peu renseignée les éditions du Zodiaque ayant eu la mauvaise idées de s’arrêter avant de couvrir totalement ce territoire à la Bavière et au Palatinat. Je me suis donc appuyé sur des sources anciennes mais fiables comme le livre de Harald Busch : " l'art roman du Saint-Empire" ou encore celui de Louis Grodecki: "L'architecture ottonienne" et enfin le très utile petit livre en allemand de Ehrenfried Kluckert : "Romanik in Baden-Württemberg" et quelques autres textes et livres épars trouvés sur place.





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