samedi 22 novembre 2025

Les deux églises romanes de Bourg-Saint-Andeol.(Visite extérieure).

 


C’est par le sud est que j’aborde la ville de Bourg-Saint-Andéol, la plus importante du sud du département de l’Ardèche. Par cette itinéraire la route descend en pente régulière jusqu’au Rhône que domine comme un phare la flèche de l’église Saint-Andéol.

 

Comme je l’ai évoqué dans mon article précédent la ville était occupée dès l’époque romaine et aurait et le lieu du martyr de Saint-Andéol l’évangélisateur du Vivarais. La présence du temple dédié à Mithra, un des plus grands de Gaule, sur cette berge du Rhône atteste déjà d’une importante agglomération romaine. Elle le restera jusqu’à l’époque carolingienne et au-delà.

 A cette époque il n’y avait pas comme aujourd’hui de pont pour traverser le fleuve mais un port double et au moins quatre sanctuaires dont ne subsiste que la chapelle Saint-Polycarpe et une grande église dédiée à Saint-Etienne et Saint-Jean qui, après le transfert des reliques de Saint-Andéol, elle sera placée sous le vocable du saint martyr.

Cette église, voulue par l’évêque de Viviers, un certain Bernouin pour accueillir les reliques du saint sera bâtie une église, achevée dans le style carolingien dans la seconde moitié du IXe siècle.

Je reviendrai plus tard sur la légende de Saint-Andéol.

De cette église il ne reste presque plus rien sauf la pierre tombale de l’évêque et le tombeau du saint. Parfois cependant on peut trouver quelques pierres avec un motif d’entrelacs perdues dans la maçonnerie de l’église romane actuelle. Un relevé précis serait nécessaire mais il est hélas rendu difficile par un accès impossible d’une bonne partie du chevet.



A la fin du XIe sera entreprise la construction de l’église actuelle qui sera achevée au XIIe et deviendra un des plus vastes édifices romans de la vallée du Rhône. L’église subira, comme beaucoup d’autres dans la région les destructions importantes des guerres de religion et fera l’objet de plusieurs restaurations l’une de sauvegarde au XVIIIe et l’autre plus radicale au XIXe, pour tenter de restituer un aspect plus « médiéval » à l’édifice. De nouvelles restaurations seront entreprises après les bombardements de 1944.


L’église accrochée sur un promontoire qui domine la ville qui s’étend jusqu’au fleuve, présente un plan basilical classique, avec une particularité cependant, celle de ne pas posséder de façade occidentale, car elle avait deux absides opposées, caractéristique des églises carolingiennes, et les gardera jusqu’au XVIIIe, où l’on reconstruisit la façade actuelle.

Elle est dotée d’un vaste transept très saillant au-dessus duquel a été bâti le clocher octogonal dans un style antiquisant qui rappelle bien des édifices de la Provence proche.  Il  faut un regard attentif pour déceler la décoration minutieuse de ce clocher qui rappelle celui de l’église de La Garde-Adhémar de l’autre côté du Rhône.




L’église conserve encore un important décor de bandes lombardes. Au nord on devine encore, noyé dans les constructions plus récentes, les reliefs d’un ancien cloitre roman. La visite intérieure se poursuivra avec l’article suivant.

Une mention pour la chapelle Saint-Polycarpe, située quelques dizaines de mètres en contrebas de l’église principale. Très largement remaniée au XVIIIe elle conserve une crypte préromane a plan tréflé, c’est dans cette crypte que furent découvertes à l’IXe siècle les reliques de saint Andéol. Cette crypte est hélas inaccessible.


La nef n’est pas romane et reprend simplement le plan de l’ancienne après l’avoir allongé ; en revanche la façade parait plus authentique au moins en partie basse, avec son joli portail décoré d’une frise végétale.

On remarque aussi le réemploi de pierres à entrelacs noyées dans la maçonnerie et une pierre couverte de ces étranges signes gravés comme ceux que j’avais déjà signalé à Larnas (je vous laisse le soin de vous reporter à mon précédent article à ce sujet).



 

Malgré plusieurs tentatives je n’ai jamais pu visiter cette crypte, qui au-delà de son immense intérêt historique et architectural, conserverait aussi de nombreux signes gravés et des mentions épigraphiques similaires à celles d’autres églises voisines. Bien que propriété de la commune, cette chapelle aurait été mise à disposition d’une organisation ou association viticole, confirmant le peu de souci de certains de nos édiles pour la richesse de notre patrimoine. J’espère qu’un jour cette chapelle trouvera un meilleur destin. Peut-être qu’une petite prière à saint Andéol aidera...

mercredi 12 novembre 2025

Un dieu lointain et des sources. Bourg-Saint-Andéol (première partie).

 


Avec ce premier article consacré à Bourg-Saint-Andéol, je m’écarte un peu du cadre que j’ai fixé à ce blog, le premier Moyen Age, jusqu’au XIIe siècle.

Cependant on ne comprend bien chaque époque que grâce à celles qui les ont précédées mais aussi à celles qui leur succèdent immédiatement ; comme les racines et les branches de chaque histoire.

Dans ce territoire du sud de l’Ardèche et du nord du Gard, l’ancien passé est partout sensible, dans de magnifiques paysages, en passant par la grotte Chauvet ou les nombreux témoins de la période néolithique.  Les Celtes et les Romains ont également durablement laissés leur empreinte.

Parmi ces traces du passé, il y celle du dieu Mithra, que l’on retrouve souvent aux marches de l’Empire, en Germanie ou en Angleterre le long du mur d’Hadrien ou dans l’actuelle Turquie.

Ce dieu, au culte emprunt de mystères, accompagnait souvent les légionnaires, véritables vecteurs d'une civilisation romaine à vocation universelle. Dans cette province de Gaulle, conquise bien avant César, les légionnaires récompensés de leurs services étaient nombreux à s’installer, pourvus d’un lopin de terre et de vigne.

Avec eux les accompagnait un dieu venu des confins de l’orient, dieu, si populaire que certains auteurs pensent qu’il aurait pu supplanter le christianisme si ce dernier n’était devenu, plus tard, religion officielle de Rome.

Les similitudes entre les deux religions sont nombreuses ; comme la croyance en un Dieu unique, à l’existence d’une vie éternelle après la mort et à l’universalité de l’âme. Mais aussi certaines pratiques rituelles comme celle du baptême. L'eau si précieuse dans ces régions est le plus souvent au cœur de tous ces cultes.

En effet parmi les nombreux attributs que l’on prête à Mithra il y a de pouvoir faire surgir une source d’une de ses flèches.

Les traces de Mithra sont encore bien réelles dans cette région, comme je l’ai déjà évoqué dans un de mes billets à propos de la commune de Saint-Montan. Au bord du ruisseau de la Tourne au sud de la ville médiévale, qui rejoint le Rhône a été retrouvé un ancien temple dédié à Mithra dont subsiste un bas-relief fortement usagé et miraculeusement préservé. Pour en comprendre tout l’intérêt je joins une sculpture du musée de Metz par comparaison.





Le long de ce ruisseau, aux eaux miraculeusement fraiches et claires, ont été aménagés jusqu’aux siècles les plus récents de nombreux ouvrages hydrauliques, comme le beau lavoir qui semble s’inspirer des anciens temples antiques, très proche par son style j’ai voulu partager quelques images du lavoir tout proche de Pont-Saint-Esprit.






L’eau, source de vie et de spiritualité est partout présente, mais fragile et inestimable, elle nous retient à l’essentiel. Le lieu calme et verdoyant est un véritable ilot de fraicheur.

Lavoir de Pont-Saint-Esprit.

Lavoir de Pont-Saint-Esprit.


dimanche 9 novembre 2025

L'église saint Vincent de Gras et la chapelle saint Ferréol; les oubliées.

 

 

Je quitte le village de Gras, pour rejoindre Bourg-Saint-Andéol en passant par le hameau Saint-Vincent à moins d’un kilomètre de gras au pied du contrefort calcaire où est installé la commune.






On peut y découvrir une modeste église dont la majeure partie date du XIIe siècle mais qui a malheureusement été défigurée par les adjonctions successives d’une vaste et disgracieuse sacristie qui prive la vue sur une partie du chevet ainsi que le doublement de la nef.

Il faut imaginer une église avec une nef unique et un transept saillant comme à Larnas, sans toutefois de coupole à la croisée du transept. Les murs ont été renforcés par des arcs de décharge et la nef légèrement brisées.





Comme le fait remarquer Claudiane Fabre-Martin il semble que tout ait été fait pour l’enlaidir par l’ajout d’une épaisse couche de ciment qui recouvre même une partie des lauzes de la couverture, mais aussi la mise en œuvre d’un badigeon rose et noir à l’intérieur.

Pourtant les auteurs du Zodiaque reconnaissent dans cette église un édifice succédant à un autre bien plus ancien sans doute contemporain des édifices carolingiens de la région.









Espérons qu’un jour, une restauration et des fouilles seront envisagées pour rendre un peu de lustre à cette modeste église.

Plus au sud et à l’approche de Bourg Saint-Andéol je découvre presque à l’improviste une modeste chapelle perdue dans les vignes au hameau de Saint-Ferréol.



Sans plus de sources dans aucun de mes ouvrages je n’ai trouvé d’informations sur cette chapelle ni même dans le si bien renseigné site consacré au patrimoine de l’Ardèche.

Pourtant certains éléments de cette chapelle permettent de penser qu’ils datent de l’époque romane, comme l’appareillage irrégulier des pierres, le chevet et surtout une baie en plein cintre au mur nord.







Je laisse à chacun se faire son idée sur cette petite chapelle et je serais heureux de plus d’informations à son propos si quelqu’un en possède

 

 



vendredi 31 octobre 2025

Gras; l'assoiffée.


Je poursuis mon chemin dans le sud de l'Ardèche en quittant Larnas vers la commune de Gras. Située sur un plateau calcaire aride, la localité doit son nom à un mot local synonyme d'assoiffé, en raison de la sécheresse des sols qui a pourtant favorisé la culture de la vigne dès l'époque romaine.

L'église actuelle dédiée à Notre-Dame succède à un édifice bien plus ancien. Il ne reste presque plus rien de l'époque romane, si ce n'est la silhouette de l'église noyée dans les habitations, si ce n'est un beau portail tardif en plein cintre avec une archivolte, avec un décor en dents de scie qui rappelle celui de Ruoms. Les sculptures du tympan et des impostes sont plus tardives.




Au-dessus du village, au cimetière, il faut aller voir la charmante chapelle Saint-Blaise. Située sur un éperon rocheux en légère pente, dont elle épouse la forme, la chapelle donne une impression de profondeur. Soigneusement restaurée, elle garde un aspect authentiquement roman, cependant son chevet a fait l'objet d'une importante restauration au XVIIe.









Elle est construite en petit appareil avec une voûte en berceau continu légèrement cintré avec deux travées.





On peut remarquer dans la voûte de nombreux orifices noyés dans la maçonnerie, sans doute des vases acoustiques que l'on retrouve dans d'autres édifices proches mais dont la fonction avait aussi une finalité de drains d'assainissement.