samedi 30 décembre 2017

La legende de Sainte-Jalle.

Sainte-Jalle occupe une place particulière pour moi , depuis qu'enfant nous nous y rendions à l'occasion de vacances chez des amis qui y avaient une maison de campagne. Ce n'est que plus tard que j'en compris toute la force symbolique.Cette magnifique petite église est l'une des plus singulières de cette région isolée de la Drôme qui correspond à un territoire autonome entouré d'un cirque de montagnes dominées par le mont Vanige, dont le nom a pour origine un petit district gallo-romain le " pagus Baginensis", bien éloigné du grand axe rhodanien de ses multiples églises.
À l'origine y était honoré une divinité topique, Baginus auquel était associé des déesses les Baginatiae.
La présence de ce lieu de culte original perpétué par les gallos-romains, est attestée par des autels conservés dans l'église et une inscription encastré dans le pilier séparant l'abside centrale et l'absidiole Nord.

C'est toutefois une sainte locale qui donnera son nom au village actuel.
La légende rapporte que Sainte Galla ou Sainte Galle , aurait délivré des barbares les lieux qu'ils occupaient au cinquième ou sixième siècle. Par déformation le mot de Galla
deviendra Jalle.
La sainte aurait alors prit le voile à Valence avant d'être enterrée dans son village d'origine.
C'est à l'emplacement de cette église d'origine que fut construite l'actuelle église dédiée à Notre-Dame de Bauvert, qui a préservé la mémoire de la jeune Sainte. Par la suite Sainte Jalle deviendra un prieuré clunisien.




L'église que l'on découvre aujourd'hui est une belle construction du XIIe siècle qui présente une ordonnance très simple. Elle est composée d'une nef à trois travées avec un transept sur lequel s'ouvrent trois absides de plans semi-circulaires



la nef a été restaurée postérieurement est couverte d'une voûte en plein cintre maintenue par des arcs doubleaux retombant sur des pilastres au-dessus de piliers massifs. L'actuelle croisée du transept porte un lourd clocher. Les parties hautes du cœur et de la nef ont subi d'anciennes modifications il est formé de trois absides semi-circulaires ouvrant sur le transept par des arcs brisés.



 Les chapiteaux sont également d'une grande simplicité décorée de feuillages stylisés ou de palmettes.







 On remarquera la polychromie des pierres utilisées dans l'abside marquant une influence de l'architecture lombarde alpine.
Les ouvertures de la nef et des absides ont certainement été modifiées et agrandies ultérieurement à la construction.


À l'extérieur l'édifice fait preuve d'un d'un bel équilibre de ces volumes avec son chevet et ses absidioles tangentes, bien qu'il soit actuellement enterré par rapport à son niveau d'origine. Le clocher tour massif et trapu et certainement une construction plus tardive et explique la présence de nombreux contreforts disposés sans symétrie afin d'en soutenir le poids sur la nef.




La construction est en petit appareil mais laisse entrevoir ses multiples remaniements qui semblent anciens, en particulier au mur sud avec ne nombreux ajouts de maçonnerie ainsi qu'au chevet principal et bien sur pour le clocher.

Encastré en réemploi dans le clocher il faut être attentif pour observer une très curieuse sculpture qui pourrait être une grille de pierre ajourée qui était destinée à l'origine à éclairer les absides. Il s'agirait alors d'une « transenna  ». Cette petite grille de pierre est ornée d'une tête féminine surmontant une croix à cinq branches, peut-être s'agit-il d'une représentation de sainte Galle. Ce petit ouvrage est suffisamment rare pour en remarquer l'importance en particulier en corrélation avec le lieu de culte dont le thème sera rappelé au portail principal, billet que je réserve pour des raisons que vous comprendrez au tournant de l'année à venir.

mercredi 13 décembre 2017

La charte de liberté de Montelimar.

Ce magnifique témoignage est heureusement conservé dans la chapelle Saint-Pierre et est particulièrement précieux et émouvant , ce qui explique ce billet unique . On y découvre en effet les deux co-seigneurs de la famille Adhémar offrir liberté et privilèges d’impôts pour la ville de Monteil qui n'est autre que le nom d'origine de Montélimar (le petit mont).

 Selon Robert Favreau  il s'agit d'un usage d'assurer par la pierre la publicités de privilèges et exemptions qui se développe au XII) siècle en particulier avec la renaissance du droit écrit.
Il n'existe dans le sud de la France que trois documents similaires et tous dans la Drome, le plus ancien est à Crest daté de 1189, celui de Montélimar de 1198 et un de 1245 à Etoile-sur-Rhône.

Je laisse découvrir le texte dont le ton manifestement solennel est aussi un témoignage d'un autre grand mouvement du Moyen-age au tournant du XII) siècle; celui de l’émancipation des villes!

Je tente d'en donner ici le texte latin et les puristes voudront me pardonner et corriger mes erreurs, en effet je n'ai pas trouver le texte latin dans sa version d'origine, et malheureusement il n'est pas transcrit dans le musée et il aurait été dommage de ne pas lire cette belle langue:

" ANNO AB INCARNATIONE DOMINI MCXC OCTAVO EGO GERALDUS AEMARIVUS ET EGO LAMBERTUS NOS DUO DOMINI MONTILI PER NOS ET PER NOSTROS BONA FIDE ET SINE DOLO ET MERA LIBERALITATE ET SPONTANEA VOLONTATE DONAMUS ET TITULO PERFECTE DONATIONIS CONCEDIMUS OMNIBUS NOSTRIS DE MONTILIO PRESENTIBUS ET FUTURIS LIBERTATEM TALEM NE DE CETERO TOTAM VEL QUISTAM VEL ALIQUAM NOVAM EXACTIONEM VEL PRAVA USATICA IN EIS FAICIAMUS VEL ALIQUO MODO FIERI PERMITAMUS NEC EIS PER VIM VEL PER ALIQUAM FORCIAM GRAVAMEN ALIQUID VEL JACTURAM NISI NOS VEL ALIQUIS SUCCESSORUM NOSTRUM PREDICTAM DONACIONEM ET LIBERTATEM QUOCUMQUE MODO VIOLARE TEMPERAVIT JAM DICTOS OMINES NOSTROS ET RES EORUM IN VILLA MONTILI SUB DOMINO NOSTRO IN PRESENTI VEL IN FUTURO EXISTENTES AB OMNI JURE ET FIDELITATE ET OMINIO ABSOLVIMUS ET UT OMNIA SICUT SUPERIUS SCRIPTA SUNT FIDELITER OBSERVIMUS ET NULLO TEMPORE CONTRAVENIAMUS TACTIS SACROSANCTIS EVANGELIIS JURAMUS "

" L'an de l'incarnation du Seigneur 1198, moi Géraud Adhémar, et moi Lambert, nous deux seigneurs de Monteil, en notre propre nom et au nom des nôtres, de bonne foi, sans ruse, par pure libéralité et par volonté spontanée, nous donnons et nous concédons par ce titre de donation authentique à tous nos gens de Monteil, présents et futurs, une liberté telle que dorénavant, nous n'instituerons sur eux,aucune tolte ,aucune queste, aucune nouvelle taxe, ni aucun mauvais usage, et nous ne permettrons, en aucune manière, d'en créer, par contrainte, par une quelconque force, par violence, ou par des poursuites sauf ce qui est dû par le droit et par la justice, que si nous, ou l'un de nos successeurs, tentions de violer, d'une quelconque manière, cette susdite donation et liberté, alors nous délierions tous nos susdits gens, avec leurs biens, dans la ville de Monteil, qui sont actuellement sous notre dépendance ou qui y seront dans le futur, de tout serment, fidélité ou hommage, et pour respecter fidèlement tout ce qui est écrit ci-dessus sans jamais nous y opposer, en touchant les saint évangiles, nous jurons."

Magnifique traduction de Michèle Bois.




dimanche 10 décembre 2017

La chapelle castrale de Montélimar.

Actuellement placée sous le vocable de Saint-Pierre, elle conserver encore celui de Sainte-Guitre diminutif de Sainte-Marguerite.
C'est un charmant et homogène édifice du XI° siècle assez rare en Provence. Chapelle du château elle devint rapidement également église paroissiale de l'agglomération qui s'était développée rapidement au XII° ce qui démontre que loin d’être une citadelle fermée le château était une véritable résidence administrative ouverte sur la ville.

Elle conserve un plan relativement ample avec une nef unique plafonnée avec trois absidioles voûtées en cul-de-four .

La croisée du transept saillant est couverte d'une coupole sur trompes et d'un oculus central. Elle à aussi conservé ses portes d'origine à l'ouest et au sud. Les murs sont parementés en petit appareil et le chevet garde encore des arcatures lombardes.Quelques fresques sont encore visibles en particulier un grand Christ au cul-de-four de l'abside centrale datées du XV° siècle mais qui présentent un aspect archaïsant.








L'ensemble à fait l'objet d'une belle restauration, amplement méritée pour cet édifice certes modeste mais intéressant pour l'histoire de l'architecture romane dans la région. Il existe à la retombée nord de l'arc de l'abside une inscription de la dédicace à Saint-Pierre du XI° siècle que je n'avais pas remarqué  lors de ma visite, cela démontre une fois de plus la nécessité de voir et revoir ce qui parait le plus évident pour mieux apprécier la richesse du lieu ( si ben entendu quelqu'un conserve une photo de cette dédicace, je suis très amateur ) .

dimanche 3 décembre 2017

Montélimar ou l'une des plus belles résidence palatiale romane du sud de la France.

Montélimar semble être dédiée des l'origine de la création par les gallos-romains du bourg d'Aucunum à une vocation routière.

Encore de nos jours où vrombissent les moteurs de vacanciers surchauffés sur l'asphalte de l'autoroute  A7, Montélimar occupe dés l'origine un nœud routier essentiel à la traversée du Roubion entre Lyon et Marseille sur la Via Agrippa.
Mais c'est à l'époque médiévale que la ville doit son développement sur une éminence dominant la vallée du Rhône et par la volonté d'une de ces familles seigneuriales particulièrement entreprenante entre les XI° ET XII° siècles; les Adhémar. La ville prendra alors le nom de ses fondateurs "Montilium Adhemari".

Le château  construit sur une éminence dominant le fleuve, comme signe évident du pouvoir cette famille est original à plus d'un titre. En effet il est en réalité l'association de deux châteaux jumelés dans une forme originale de "copropriété" entre deux branches cousines mais associées des Adhémars qui gouvernent ensemble les vaste territoires rhodaniens des alentours.

Les châteaux que l'on visite aujourd'hui épousent selon un tracé complexe toute la butte de leur hautes murailles autour d'un donjon principal quadrangulaire au sein duquel le logis seigneurial, seconde originalité, à été conçu comme un véritable complexe palatial et non pas un ouvrage purement défensif.


Ce palais roman agrandi au XIII° siècle est l'un des plus bel ouvrage civil roman de la vallée du Rhône.

Son plan en forme de L  très simple, sur plusieurs étages il possède une loggia portée par une entrée monumentale ouverte avec une haute arcature en plein cintre à claveaux bicolores qui en fait une superbe entrée d'honneur.


L’intérieur a été fortement restauré mais le plan a toujours été conservé. Une seule tourelle d'escalier dessert les étages supérieurs et en particulier des chambres et des dépendances qui gardent encore des niches et des éviers avec déversoirs de leur date de construction.



La salle d'honneur est la plus vaste et la plus luxueuse de cet ensemble d'exception.
Tournée vers l'ouest, la ville et la vallée du Rhône, elle prend la forme d'une loggia décorée avec ostentation avec neuf fenêtrés en plein cintre à baies jumelées décorées d'un luxe de faux-tympans d'une corniche de perles et de pirouettes dans le style antiquisant propre à la Provence. Les fines colonnettes des fenêtres présentent une décoration variée avec d'élégants chapiteaux à motifs végétaux.



On remarque aussi l'usage de pierres polychromes blanches et jaunes comme à la cathédrale de Valence ou d'autres églises voisines.


Manifestement cette résidence avait avant tout une vocation administrative et de prestige elle devait être vue et admirée de tous pour manifester avec ostentation la puissance de ses occupants, c'est la raison pour laquelle cet ouvrage magnifique est d'avantage un palais qu'un château comparable par sa conception aux grands palais rhénans ou catalans.

C'est aussi un ouvrage unique dans la région et trop peu reconnu d'une ville fameuse seulement pour ses nougats et ses embouteillages...


samedi 25 novembre 2017

Les songes du Val des Nymphes.

Peu de lieux inspirent une telle nostalgie que le Val des Nymphes et ses ruines romantiques aujourd'hui déformé par une restauration certes nécessaire mais qui en amoindri le charme.

Cet ancien prieuré dépendance de Tournus et mentionné en 1059 est un site très ancien installé sur un lieu de culte antérieur aux romains dont il reste de nombreux vestiges réemployés pour certains dans l'église de La Garde-Adhémar.




La chapelle à nef unique de trois travées dont la voûte est effondrée est bâtie en moellons réguliers et est épaulée par de très larges contreforts qui lui donne cet aspect si particulier.
 Il y a quelques année à ciel ouvert elle a été aujourd'hui recouverte d'une toiture qui en diminue grandement l'attrait.

C'est à peine si l'on peu admirer encore l’exceptionnelle décoration de son abside. Elle possède en effet deux étages d'arcatures qui reprend le modèle des amphithéâtres romains, autrefois même il existait dans le chœur une statue antique décapitée qui semblait comme le témoignage des cultes passés qui se sont succèdés dans ce lieu.

L'étage inférieur de l'arcature retombe sur de forts pilastres avec des chapiteaux à feuillage tandis que l'élégante arcature supérieure présente de fines colonnettes avec des chapiteaux corinthiens.

La façade présente également un dispositif original de petits moellons et à l'étage supérieur et  d'un appareil régulier soigné comme à La Garde-Adhémar.


 La façade est très dépouillée à l'exception du portail dont l'archivolte est vraisemblablement un réemploi antique. A l’étage supérieur trois arcatures aveugles en plein cintre ont été imaginé tout comme à la Tour Magne de Nîmes marquant ainsi et à nouveau dans la région la place majeure de l'imitation des modèles antiques dans l'art roman provençal.



ce lieu reste emprunt de paix et d'une certaine magie on ne peut que regretter qu'une certaine pression touristique n'ai pas conduit ses restaurateurs à en préserver tout le charme et je partage également ici d'anciennes images d'il y moins de 20 ans , il est amusant de voir comment les temps changent notre vision des monuments et il faudrait sans doute s'interroger sur une certaine "histoire du goût" ...