lundi 18 novembre 2019

St Mary the Virgin d'Iffley, histoire et élevation exterieure.

Cette église de la proche banlieue d'Oxford est une des églises les plus étonnantes de ce voyage dans l'ouest de l'Angleterre et en tout cas l'une des plus complètes et mérite un place particulière tout comme en son temps le méritera la petite merveille de Kilpeck pourtant bien plus étudiée.

Iffley est une des rares églises de cette région à bénéficier d'une note assez fournie de Lucien Musset dans le premier volume de l'Angleterre romane parue il y a longtemps aux éditions du Zodiaque et j'essayerais de la compléter par d'autres avis d'auteurs anglais et mes observations personnelles. Mais malheureusement les sources sont rares.

En dépit d'une allure sauvage et assez "exotique" d'un point de vue français, l'église a été construite par un de ces seigneurs normand dans le sillage de la conquête, Robert de saint-Remy.
La date de construction reste contradictoire entre 1175 et 1182, selon les dernières découvertes.

Nous sommes donc en présence d'une église romane tardive sans que rien ne permette d'indiquer qu'elle ait succédé à une église plus ancienne. Cependant le Domesday Book évoque la possession de cette terre par un certain Azor, seigneur saxon à l'époque d'Edouard-le-Confesseur, et il est donc possible qu'une église ou une chapelle fût déjà présente.

Le plan de l'église actuelle est simple et finalement classique pour la plupart des églises rurales d'Angleterre.

Une nef unique plafonnée à deux travée , une travée supportant le clocher, la dernière travée à chevet plat faisant office de chœur et qui appartient déjà à l'époque gothique. Les modifications à l'époque gothique semblent d'ailleurs avoir été importante car jusqu'au XIXe une fenêtre d'ogive avait été réalisée dans la façade en lieu et place de l’oculus roman qui n'a été reconstruit que plus tard pour donner une unité "romane" à la façade, comme en témoigne cette ancienne gravure.


Le clocher est massif et de plan carré et reprend à l'une des fenêtres la riche décoration de la façade sur laquelle je reviendrais mais ses importantes restaurations en ont sans doute modifié l'aspect d'origine.

L'ensemble de ces éléments semble avoir été confirmé par une vaste campagne de fouilles au début des années 90, qui révéla également la présence de nombreux restes humains autour de l'église mais aussi son appartenance pour l'essentiel à la fin du XIIe à l'exception du chœur.

J'ai également associé à ce premier billet les images du mur nord et de son portail ou seuls les motifs géométriques dominent tant aux archivoltes du portail qu'à la belle fenêtre de la nef. Comme vous pourrez le voir les motifs figuratifs sont plus nombreux au portail ouest de la façade et encore davantage au portail sud mais ce sera pour les prochains articles.





Google translate:

This church in the suburbs of Oxford is one of the most amazing churches of this trip in the West of England and certainly one of the most complete and deserves a special place just as in his time will deserve the little marvel of Kilpeck yet much more studied.
Iffley is one of the few churches in this region to benefit from a fairly rich note of Lucien Musset in the first volume of Romanesque England published a long time ago by the Zodiac editions and I would try to supplement it with other opinions English authors and my personal observations. But unfortunately the sources are rare.
Despite a wild and quite "exotic" look from a French point of view, the church was built by one of these Norman lords in the wake of the conquest, Robert de Saint-Remy.
The date of construction remains contradictory between 1175 and 1182, according to the latest discoveries.
We are therefore in the presence of a late Romanesque church with nothing to indicate that it has succeeded to an older church. However the Domesday Book evokes the possession of this land by a certain Azor, Saxon lord at the time of Edward the Confessor, and it is possible that a church or a chapel was already present.
The current church plan is simple and ultimately classic for most rural churches in England.
A single nave capped with two span, a span supporting the bell tower, the last bay with flat bedside acting as a choir and which already belongs to the Gothic era. The changes in the Gothic period seem to have been important because until the nineteenth an ogive window had been made in the facade instead of the Roman oculus which was rebuilt later to give a "Romanesque" unit in the facade, as evidenced by this ancient engraving.
The steeple is massive and square and resumes at one of the windows the rich decoration of the facade on which I would return but its important restorations have probably changed the original appearance.
All these elements seem to have been confirmed by a vast excavation campaign in the early 90s, which also revealed the presence of many human remains around the church but also its membership for the most part at the end of the twelfth to except the choir.
I also associated with this first post the images of the north wall and its portal or only the geometric patterns dominate both the archivolts of the portal and the beautiful window of the nave. As you can see the figurative patterns are more numerous at the west gate of the facade and even more at the south portal but it will be for future articles.

samedi 9 novembre 2019

Merveilles et enigmes du tympan de Billesley.

Billesley est un minuscule hameau situé à quelques kilomètres de Stratford on Avon, il faut se donner du mal pour en trouver sa toute petite église perdue au milieu des arbres à proximité d'un luxueux manoir transformé en hôtel.

Pourtant le lieu conserve un charme incomparable qui me marque encore lumineusement  après une journée de déboires pour trouver des églises impossibles et finalement achever cette première journée de voyage prématurément compromise par une crevaison.

J'ai appris plus tard que Shakespeare s'y serait marié avec Ann Hathaway  et semble avoir marqué ce lieu de son empreinte.

Celle-ci est minuscule et totalement reconstruite au milieu du XVIIe, elle ne conserve rien de son passé médiéval si ce n'est quelques traces de maçonnerie en opus spicatum qui sont peut-être d'origine ou des reconstructions à l'identique de l'église ruinée. L’intérieur n'est pas dénué de charme et sert aussi de gîte de passage pour des voyageurs. c'est ainsi que je découvrît deux lits de camp et des ustensiles divers de camping dans l'extension où sont conservées les deux sculptures qui motivaient ma visite.

C'est en effet deux œuvres majeures que conserve cette église, l'une est un fragment de sculpture saxonne que je vous ai présentée dans un précédent billet et l'autre un superbe petit tympan qui nous occupera ici.

C'est une pierre unique de dimension modeste qui a été manifestement rognée à son angle inférieur gauche et dans sa partie supérieure, la décoration abondante et foisonnante en recouvre toute la surface selon cette technique de "l'horror vacui" assez fréquent dans l'art byzantin est tout à fait remarquable.

Malcolm Thurlby dans son excellent ouvrage "The Herefordshire School of Romanesque Sculpture" dont m'avait conseillé la lecture Julianna (paix à son âme), rattache cette oeuvre à la grande école de sculpture du Herefordshire dont je présenterais un jour les merveilles. En particulier il insiste sur les similitudes de ce style et de celui des fonts baptismaux de Eardisley mais aussi de Shobdon et de Kilpeck .

La lecture du tympan qu'il nous propose est celle d'une lutte du bien contre le mal.
Le personnage central vêtu d'une tunique et d'une sorte de bonnet mais désarmé semble se débattre dans une forêt luxuriante de feuillage entrelacé. Il est poursuivi par deux créatures monstrueuses, un serpent et un dragon ou un basilic dont une patte disproportionnée lui effleure le dos.


Les deux créatures maléfiques semblent elles-même retenues par le feuillage dans leur poursuite.



Il rejoint dans sa course un refuge de  pureté représenté par une colombe perchée sur le feuillage dont elle se détache parfaitement.

Il y aurait aussi une autre ligne de lecture plus symbolique mais très proche et assez coutumière à l'art roman;  celle de la lutte entre la bonne parole figurée par l'oiseau qui est aussi un symbole d'éternité et de la mauvaise parole représentée par les deux créatures. Le feuillage entrelacé étant aussi une symbolique de la parole vertueuse et l'enroulement infini des spires végétales celui de l'éternité. Le personnage central tient dans ses mains une tige qui semble s'épanouir ce qui signifierait qu'il a trouvé la bonne voie et en récolte la récompense. Je laisse à plus compétent que moi l'art d’interpréter cette sculpture.

Reste la question délicate de sa datation quasiment impossible en raison de l’absence de source écrite. De plus les conditions de sa redécouverte dans la maçonnerie de l’église reconstruite du XVIIe compliquent le raisonnement.
Il semble cependant qu'il s'agisse d'une oeuvre postérieure à la conquête Normande et vraisemblablement de la première moitié du XIIe siècle si l'on s'accorde à l'attacher à l'école du Herefordshire. Deborah Kahn évoque également l’absence de tympans sculptés en Angleterre avant la conquête de 1066.

Rien cependant ne permet de rattacher cette pièce isolée à prés de 100 kilomètres à l'est du foyer de sculpture du Hereford sauf à s'interroger sur d'hypothétiques relations d'un sculpteur ou de l'un de ses élèves entre ces deux régions distantes même pour l'époque. Mais il est vrai que les similitudes de styles sont frappantes.
Je vous invite à poursuivre la discussion sur l'excellent site de Lionel Wall "Great English Churches" qui est en lien sur le bandeau de ce blog.


Ce qui nous rendra tous unanimes, c'est la grande qualité de cette petite sculpture mais aussi sa richesse  figurative. La finesse de l’exécution du feuillage est des animaux fantastiques est remarquable. Malgré une certaine "gaucherie" du personnage central l'impression du mouvement est aussi très nette. La colombe est aussi une magnifique sculpture toute en délicatesse et en vivacité.
Malcolm Thurlby rapelle aussi les liens entre l'école du Herfordshire et la sculpture française de Saintonge mais aussi des influences byzantines transmises par les manuscrits et les ivoires.
L'abondance des sculptures et aussi "l'horror vacui" en est une belle illustration.



Google translate:

Billesley is a tiny hamlet located a few miles from Stradford on Avon, you have to go to great lengths to find its tiny church lost among the trees near a luxurious mansion turned into a hotel.
Yet the place retains an incomparable charm that still marks me brightly after a day of setbacks to find untraceable churches and finally complete the first day of travel prematurely compromised by a puncture.
I learned later that Shakespeare would have married Ann Hathaway and seems to have marked this place with his imprint.
The church is tiny and totally rebuilt in the middle of the 17th century it does not retain anything of its medieval past except for some masonry traces in opus spicatum that may be original or reconstructions to the identical of the ruined church of origin. The interior is not devoid of charm and the church also serves as a guesthouse for travelers. This is how I discovered two camp beds and various camping utensils in the extension of the church where the two sculptures that motivated my visit are kept.
It is indeed two major works that preserve this church, one is a fragment of Saxon sculpture that I presented to you in a previous ticket and the other a superb small tympanum which will occupy us here.
It is a unique stone of modest size that has been obviously trimmed at its lower left corner and in its upper part, abundant and abundant sculpture covers the entire surface using this technique of "horror vacui" quite common in the Byzantine art.
Malcolm Thurlby in his excellent work "The Herefordshire School of Romanesque Sculpture" which I was advised to read Julianna (peace to his soul) relates this work to the great sculpture school Herefordshire which I would one day show the wonders. In particular, he insists on the similarities of this style and that of the baptismal font of Eardisley, but also of Shobdon and Kilpeck.
The reading of the tympanum that he proposes to us is that of a struggle of good against evil.
The central figure dressed in a tunic and some sort of cap but disarmed seems to be struggling in a lush forest of intertwined foliage. He is pursued by two monstrous creatures, a snake and a dragon or a basilisk with a disproportionate paw touching his back.
The two evil creatures themselves seem to be retained by the foliage in their pursuit.
He joins in his race the purity represented by a dove perched on the foliage from which it stands out perfectly.
There would also be another line of reading more symbolic but very close and quite customary to Romanesque art; that of the struggle between the good word represented by the bird, which is also a symbol of humanity and the bad word represented by the two creatures. The intertwined foliage is also a symbol of the virtuous speech and the infinite winding of the spirits that of eternity. The central character holds in his hands a stem that seems to bloom, which would mean that he has found the right path and is reaping the reward. I leave to more competent than me the art of interpreting this sculpture.
Remains the delicate question of dating almost impossible because of the lack of written source. In addition, the conditions of its rediscovery in the masonry of the rebuilt church of the seventeenth complicated the reasoning.
It seems, however, that this is a work after the Norman conquest and probably the first half of the twelfth century if we agree to attach it to the Herefordshire School. Deborah Kahn also evokes the absence of sculpted tympanums in England before the conquest of 1066.
There is nothing, however, to link this isolated piece nearly 100 kilometers east of Hereford's sculpture hearth, except to question the hypothetical relationship of a sculptor or one of his students between these two regions. distant even for the time. But it is true that the similarities of styles are striking.I invite you to continue the discussion on the excellent site of Lionel Wall "Great English Churches" which is linked on the banner of this blog.
What will make us all unanimous is the high quality of this small sculpture but also its figurative richness. The finesse of the foliage execution is fantastic animals is remarkable. Despite some "awkwardness" of the central character the impression of the movement is also very clear. The dove is also a magnificent sculpture with delicacy and liveliness.
Malcolm Thurlby also drapes the links between the Herfordshire School and the French Saintonge sculpture but also Byzantine influences transmitted by manuscripts and ivories.
The abundance of sculptures and also the "horror vacui" is a good illustration.