lundi 30 novembre 2020

La cuve baptismale de Morville.

 


Cette œuvre est sans doute la pièce maitresse de cette simple église de campagne, connue depuis très longtemps ainsi qu'en atteste cette gravure extraite du "The Archeological Journal" de 1844.

Dessin paru dans "The Archeological Journal" de 1844


La cuve est gravée dans un bloc cylindrique monolithique d'une hauteur d'environ 70 cm pour un diamètre de 80 cm, reposant sur un socle plus récent qui laisse supposer que son emplacement d'origine était diffèrent.

La cuve est entièrement recouverte d'une sculpture ornementale à grands motifs de rosaces reliées les unes aux autres par des masques animaux de formes carrée un peu comme une chaine continue. Les yeux en amande des masques laissent penser à des têtes de fauves. Parfois c'est un masque humain . Pourtant pour certaine roses les cercles s'entrecroisent seulement comme si le sculpteur n'avait eut la place de mettre en place la totalité du motif décoratif.






Il y a huit rosaces au total qui présentent toutes un décor d'une grande finesse avec au centre des marguerites des feuilles et des motifs qui ressemblent à des têtes d'oiseaux ou des plumes. Les écoinçons et la base de la cuve sont également décorés de motifs de feuillages de façon à ce que la sculpture recouvre totalement la pierre selon la technique bien connue de l'"horror vacui".





L'ensemble peut être daté de la fin du  XIIe siècle et malgré une recherche décorative poussée, le trait est parfois imprécis et malhabile. Le décor de cercles perlés reliés par des têtes animales fait incontestablement penser à d'autres œuvres plus maitrisées sur le plan technique attribuées à l'école de sculpture du Herefordshire, magistralement décrites par Malcolm Thurby dans son ouvrage: "The Herefordshire School of Romanesque Sculpture". Il est possible que son auteur ait été influencé par cette grande école de sculpture de la région voisine ou ait été formé par un autre artiste de cette région.


 



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Morville's baptismal fonts.


 This work is undoubtedly the centerpiece of this simple country church, known for a very long time as evidenced by this engraving taken from "The Archeological Journal" of 1844.The tank is engraved in a monolithic cylindrical block with a height of about 70 cm and a diameter of 80 cm, resting on a more recent plinth which suggests that its original location was different.The tank is entirely covered with an ornamental sculpture with large patterns of rosettes connected to each other by animal masks of square shapes, much like a continuous chain. The almond-shaped eyes of the masks suggest the heads of wild animals.There are eight rosettes in total, all of which are decorated with great finesse with daisies in the center of the leaves and patterns that resemble bird heads or feathers. The spandrels and the base of the tank are also decorated with foliage patterns so that the sculpture completely covers the stone using the well-known technique of "horror vacui".The whole can be dated to the end of the 12th century and despite extensive decorative research, the line is sometimes imprecise and clumsy. The decoration of beaded circles connected by animal heads undoubtedly brings to mind other more technically mastered works attributed to the Herefordshire School of Sculpture, masterfully described by Malcolm Thurby in his work: "The Herefordshire School of Romanesque Sculpture ". It is possible that its author was influenced by this great school of sculpture in the neighboring region or was trained by another artist from this region.

samedi 21 novembre 2020

Saint-Grégoire de Morville.

 C'est sans doute à Grégoire le Grand qu'est dédicacée la petite église de Morville cette première étape romane du Shropshire dont la toponymie rappelle une autre commune de Normandie Morville-sur-Andelle ce qui n'est sans doute pas sans rapport avec cette fondation de la première moitié du XIIe. En effet on ne trouve pas de trace ici d'une église saxonne antérieure de telle sorte que c'est sans doute aux nouveaux conquérants que l'on doit la création de l'église d'un ancien prieuré dépendant de l'abbaye de Shrewsbury.

L'église n'attire pas le premier regard, et le but de ma visite était à l'intérieur comme vous le découvrirez dans le second article. Mais malgré les évidentes restaurations de cette église dans un style pseudo-gothique on devine bien la structure du bâtiment normand ainsi que la base du clocher imposant.


Je n'avais pas lors de ma visite remarqué la porte nord ou porte des prêtres qui conserve un petit tympan très usé figurant sans doute l'arbre de vie. Cependant celle-ci n'a pas échappé à la curiosité avisée de Barbara Zeitler dans le Corpus of Romanesque sculpture in Britain et je vous en donne ici un aperçu.



La porte sud conserve plus surement encore le souvenir du passé roman de cette église mais il a été fortement restauré ainsi que les chapiteaux; mais le chapiteau de droite à motif végétal pourrait bien être un réemploi de l'église d'origine.


Les belles ferrures de la porte, semblent bien pouvoir être datées de la période romane.



A l'intérieur, l'église reproduit le schéma très courant des églises à nef unique, si nombreuses en Angleterre.

On remarquera le bel arc triomphal qui sépare la nef du chœur avec son décor régulier de billettes .



A l'époque gothique il semble que la nef ait été agrandie par l'adjonction de deux faux collatéraux séparés par des arcatures en plein cintre sans doute une persistance de la tradition romane car ces colonnes sont gothiques.

Aux écoinçons de chaque arcature ont été sculpté des têtes d'animaux fantastiques qui appartiennent manifestement au bestiaire anglo-saxon tel que l'on peut le retrouver dans d'autres églises. 




Les chapiteaux d'origine sont peu nombreux mais un chapiteau mutilé figurant un homme dont on ne devine qu'une partie est encore visible tenant peut-être un instrument de musique.

Morville conserve surtout une belle cuve baptismale que vous découvrirez plus loin.


dimanche 15 novembre 2020

Une trop rapide découverte du Shropshire.

Uppington 

 Les prochains articles à venir, seront consacrés aux églises romanes du Shropshire, un comté méconnu de la région des West Midlands entre la vaste et industrieuse ville de Birmingham et le Pays-de-Galles dont il garde l'ancienne frontière.

Ce comté est l'un des plus ruraux d'Angleterre et célèbre pour ses paysages de collines et de rochers accidentés comme les Stiperstones ou les Clee Hills, il est traversé par le fleuve de la Severn qui baigne les rives de son chef-lieu historique la ville de Shrewsbury de fondation romaine mais qui fut le siège d'une château stratégique et d'une importante abbaye fondée par les normands après la conquête du pays.

Cette ville doit aussi sa célébrité à une native du pays, Edith Pargeter plus connue sous le nom d'Ellis Peters auteure à succès d'une série de romans policiers mettant en scène la vie d'un moine du XIIe, frère Cadfaël. Bien que ces romans n'aient pas la même force que le célèbre ouvrage d'Umberto Ecco; je dois avouer en avoir lu un certain nombre avec plaisir.

Ce cadre est aussi le prétexte pour rappeler le  contexte historique, en rapport avec la période romane en Angleterre et qui nous intéresse au premier chef car il explique en partie les décennies de luttes qui opposeront la France à l'Angleterre; celui du  passage de la dynastie normande à la dynastie angevine qui sert de toile de fond aux romans d'Ellis Peters.

Guillaume, Duc de Normandie qui rend hommage au roi de France, conquiert, ce qui est un fait unique, l'Angleterre à partir de 1066 date de la bataille d'Hastings. Son règne est relativement long, plus de 20 ans. A sa mort en 1087 son troisième fils lui succède; Guillaume II jusqu'en 1100, mais il ne garde pas la Normandie qui est donnée à son frère ainé Robert Courteheuse; preuve s'il en est que l'Angleterre n'était pas une priorité dans l'esprit des princes normands.

Guillaume II meurt sans héritier et c'est son frère, quatrième fils de Guillaume le Conquérant;  Henri Ier dit " Beauclerc" qui hérite du trône pour un long règne jusqu'en 1135. Ce roi est un bâtisseur et c'est sous son règne que seront entrepris avec élan la plupart des chantiers de construction ou de reconstruction d'édifices civils et religieux dans toute l'Angleterre.

Henri n'a pas de fils à sa mort et fait d'une particulière importance il désigne sa fille Mathilde pour lui succéder.

Ainsi c'est avec les Normands qu'est introduit en Angleterre le droit de succession des filles en l'absence de fils, droit qui prévaut jusqu'à aujourd'hui et qui explique en partie les revendications anglaises sur la France en particulier à la fin de la dynastie capétienne.

Mathilde fait partie de ces fortes figures féminines fortes de l'histoire du Moyen Age. Elle est évincée du trône par la complicité des seigneurs normands, hostiles à la prééminence d'une femme  en Angleterre et d'un petit-fils de Guillaume, Etienne de Blois qui se proclamera roi.

Une véritable guerre civile s'engagera alors entre les deux camps et Mathilde parviendra grâce à son second époux le comte d'Anjou, Geoffroy Plantagenet, elle parviendra à imposer la succession de son fils au trône le futur Henri II qui rétablira une forte autorité en Angleterre mais aussi au pays de Galles et en France grâce à son mariage avec une haute grande figure féminine du Moyen Age, Aliénor d'Aquitaine.

Il ne s'agit ici que d'aborder une part très importante de l'histoire d'Angleterre mais ce qui est un fait important c'est que pendant cette période l'église d'Angleterre ne fit que prospérer et multiplia ses échanges avec la France que ce soit en Normandie, en Anjou dans le Poitou et en Aquitaine ce qui explique bon nombre de correspondances dans les techniques et les arts de ces grandes régions pendant toutes la période romane.

Pour en savoir plus je vous invite à lire ces deux ouvrages:

- " L'Empire des  Plantagenêts" un numéro spécial des Editions de l'Histoire,

- " L'Empire des Plantagenêts" un livre de Martin Aurell.

Pour le reste je tâcherai de vous faire découvrir quelques-unes des églises romanes de cette belle région que je n'ai fait qu'effleurer mais qui reserve de belles surprises.

Wroxeter

Aston Eyre


Berrington

Claverley

Morville
Much Wenlock


Upton Cresett


 

Google translate.

The next articles to come, will be devoted to the Romanesque churches of Shropshire, a little-known county in the West Midlands region between the vast and industrious city of Birmingham and Wales from which it guards the old border.This county is one of the most rural in England and famous for its landscapes of hills and rugged rocks like the Stiperstones or the Clee Hills, it is crossed by the River Severn which bathes the banks of its historic capital. the city of Shrewsbury of Roman foundation but which was the seat of a strategic castle and an important abbey founded by the Normans after the conquest of the country.This city also owes its fame to a native of the country, Edith Pargeter better known under the name of Ellis Peters, successful author of a series of detective novels featuring the life of a 12th century monk, Brother Cadfaël. Although these novels do not have the same force as the famous work of Umberto Ecco; I must admit that I read a number of them with pleasure.This framework is also the pretext for recalling the historical context, in connection with the Romanesque period in England and which interests us first and foremost because it partly explains the decades of struggles which opposed France to England; that of the passage from the Norman dynasty to the Angevin dynasty which serves as a backdrop to the novels of Ellis Peters.William, Duke of Normandy who pays homage to the King of France, conquers, which is a unique fact, England from 1066 date of the Battle of Hastings. His reign is relatively long, more than 20 years. On his death in 1087 his third son succeeded him; Guillaume II until 1100, but he does not keep Normandy which is given to his elder brother Robert Courteheuse; proof if there is that England was not a priority in the minds of the Norman princes.Guillaume II dies without an heir and it is his brother, fourth son of William the Conqueror; Henri Ier known as "Beauclerc" who inherits the throne for a long reign until 1135. This king is a builder and it is under his reign that will be undertaken with enthusiasm most of the construction sites or reconstruction of civil buildings and religious throughout England.Henri has no son when he dies and is of particular importance he designates his daughter Mathilde to succeed him.Thus it is with the Normans that the right of succession of daughters in the absence of a son was introduced in England, a right which prevails until today and which partly explains the English claims on France, in particular to the end of the Capetian dynasty.Mathilde is one of those strong female figures in the history of the Middle Ages. She was ousted from the throne by the complicity of the Norman lords, hostile to the preeminence of a woman in England and of a grandson of William, Etienne de Blois who proclaimed himself king.A real civil war will then ensue between the two camps and Mathilde will succeed thanks to her second husband the Count of Anjou, Geoffroy Plantagenet, she will succeed in imposing the succession of her son to the throne the future Henri II who will restore a strong authority in England but also in Wales and in France thanks to his marriage to a great high female figure of the Middle Ages, Eleanor of Aquitaine.It is only a question here of addressing a very important part of the history of England but what is an important fact is that during this period the Church of England only prospered and multiplied its exchanges with France whether in Normandy, Anjou in Poitou and Aquitaine which explains a good number of correspondences in the techniques and the arts of these great regions throughout the Romanesque period.To find out more, I invite you to read these two books:- "The Empire of the Plantagenets" a special issue of Editions de l'Histoire,- "The Empire of the Plantagenets" a book by Martin Aurell.For the rest I wl try to make you discover some of the Romanesque churches of this beautiful region that I have only touched on.