dimanche 30 juillet 2017

Saint-Restitut; l'église de l' aveugle né.

La tradition de saints est vivace en Provence comme celle de Sidoine, l'aveugle né que le Christ guérit  en lui imposant sur les yeux  de la boue et de la salive et après s’être lavé dans les eaux du Siloé recouvra la vue.
Après sa guérison il changea son nom pour celui de Restitut: " Restitutus est ei visus ".
Le culte de ce Saint est très en faveur en Provence et dans cette région de la Drôme car ce Saint est aussi celui qui accompagna les membres de la famille du Christ de Béthanie et qui accosta miraculeusement aux Saintes-Maries de la Mer à bord d'une barque sans voile ni rame. Rien d'étonnant à ce que le lieu devint aussi un but de pèlerinage important grâce à la présence des reliques du saint.
On attribue encore à Saint-Restitut la fondation de Saint-Paul-Trois-Châteaux que j'ai traité dans un précédent article.

Ainsi abordé la part de la légende qui conserve cependant une résonance particulière; l’église que l'on découvre aujourd'hui est un monument marquant de la Provence romane tant par son originalité que par la permanence de l'attachement à une tradition romaine qui est une des constance de l'art roman dans cette région.

Malheureusement, une fois encore, c’était au moins ma quatrième visite, l'église était fermée ! Je ne désespère pas cet été une nouvelle tentative et je n'aborderais donc que la visite extérieure qui est la plus intéressante.

Les premières mentions du lieu sont attestées des le Xe siècle comme dépendance de la cathédrale de Saint-Paul, mais elle ne sera mentionnée qu'au milieu du XIII e siècle lors de l'exhumation des reliques de Saint-Restitut qui furent brûlées et dispersées lors des guerres de religion, après la révolution c'est une fois de plus grâce au visionnaire de génie que fut Mérimée que l'église doit sa sauvegarde.

L'église actuelle est une église composite comprenant deux parties bien distinctes; une nef est un chevet du plus pur roman provençal avec une nef simple et un chevet polygonal de la fin du XIIe et du début du XIIIe siècle.





La partie la plus remarquable est le superbe portail méridional qui est des plus beaux exemple de l'influence des l'art antique dans l'art roman si en faveur dans la vallée du Rhône et que nous retrouverons dans d'autres billets qui suivront. L’élévation plus tardive d'une grande arcature en renforce l'harmonie ainsi que le choix d'un fronton triangulaire au dessus de l'arcature supérieure.
La sculpture est particulièrement soignée directement inspirée de l'antique, probablement de l’amphithéâtre de Nîmes. Cependant le sculpteur roman ajoute sa "touche malicieuse"comme ce curieux personnage semblant écarter le feuillage de ses mains pour passer un regard a l’extérieur .

La partie la plus ancienne et la plus originale est sans doute la tour occidentale, tour aveugle sur deux étages qui semble indépendante de l'église en dépit de nombreux remaniements.

Son intérêt principal est la présence d'une frise sculpté et d'un appareil décoratif de première importance pour l'art roman en Provence .Le décor occupe les quatre cotés de la tour, un seul est visible à l'interieur de l'église.
Le frise  ne constitue pas un ensemble parfaitement cohérent mais illustre des thèmes divers; le Christ aux adorants, l'Agnus Dei, les symboles des évangélistes, Adam et Eve et tout un répertoire d'animaux fantastiques et de personnages réalistes de cavaliers de chasseurs de maçons.



Ces carreaux sot taillés en cuvette avec des figures assez rigides souvent de profil. Ils sont tous de dimension unique à l'exception d'une pierre plus grande représentant le Christ bénissant.
Cette frise est surlignée d'une frise continue en petits carreaux de calcaire en damiers et en losanges avec un mortier rouge en imitation de l'opus signium romain.




Ce décor est aujourd'hui clairement daté du XIe siècle et n'est pas un réemploi comme on l'avait longtemps penser. S'il trouve ici une formule très originale il n'est pas éloigné d'autres grands modèles proches comme Saint-Martin d'Ainay à Lyon ou Saint-Romain le Puy en Forez . Ou encore de modèles plus proches comme Saint-Quenin de Vaison, Salagon, Moustiers-Sainte-Marie ...





Ainsi l'église de Saint-Restitut illustre à elle seule et de manière splendide toute une longue page de l'art roman provençal du début du XIe à la fin du XIIe siècle
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