jeudi 29 juin 2017

Céleste Jérusalem de Combourg ! A la découverte de l'un des objet liturgique parmi les plus rares et les plus symboliques de l’orfèvrerie romane.


Ce dernier billet clôturera cette première série consacrée à la Souabe romane avant d'autres horizons; une fois n'est pas coutume je lui consacrerais un peu plus de textes et d'images que d'ordinaire tant cette oeuvre est exceptionnelle bien que ce blog n'a pas pour objet une étude érudite que mériterait celui de la Jérusalem terrestre l'un des grand pilier de la tradition et de la foi chrétienne.

Le lustre ou couronne de lumière de l'abbaye de Combourg situé à l'aplomb de l'autel est sans doute le joyau le plus remarquable du lieu. Il est exceptionnel par ses dimensions et son état de conservation et il est sans doute le plus original des quelques exemplaires encore connus conservés à Aix-La-Chapelle et à  Hidelsheim. Le Lustre de Saint-Remi de Reims semble avoir été largement remanié au XIXe siècle et le modeste lustre du trésor de Chèvres en Charente ne lui est guère comparable.

Ce lustre est aussi appelé "Jérusalem Céleste" car il se veut une représentation hautement symbolique de la Jérusalem messianique et paradisiaque.

L'Apocalypse de Jean l'évoque ainsi " Alors l'un des sept anges au sept coupes remplis des sept derniers fléaux s'en vint me dire - Viens que je te montre la Fiancée, l'Epouse de l'Agneau - Il me transporta donc en esprit sur une montagne de grande hauteur, et me montra la Cité sainte, Jérusalem, qui descendait du ciel, de chez Dieu, avec en elle la gloire de Dieu. Elle est munie d'un rempart de grande hauteur pourvu de douze portes près desquelles il y a douze anges et des noms inscrits, ceux des douze tribus israélites: à l'orient, trois portes; au nord, trois portes; au midi, trois portes; à l'occident, trois portes. Le rempart de la ville repose sur douze assises portant chacune le nom de l'un des douze apôtres de l'Agneau". (Apocalypse; chapitre 21).

L'on peut ainsi imaginer la forte impression que devait faire ce lustre suspendu au choeur des l'église lors des offices les plus solennel.


Le lustre est suspendu par quatre "câbles" à ce qui pourrait être les points cardinaux. Chaque extrémité de cette amarre se divise en trois  ramures pour former douze point d'ancrage. Entre chaque segment de ce lien on été enfilé comme des perles de grosses sphères de cuivre des séries de deux sphères en milieu de section soit 32 sphères et cinq plus grosses sphères au point de division des segments.
Au point central de cette fixation est gravé un Christ bénissant entre l'Alpha et l'Oméga avec une inscription " Ego Sum Lux Mundi" ; Je suis la lumière du monde.

Ses dimensions sont impressionnantes avec ses 5 mètres de diamètre et sa circonférence de 16 mètres . Deux anneaux de fer forgé en constituent l'armature principale sur laquelle ont été assemblées des feuilles de cuivre argenté finement ciselées sur leur faces tant intérieures, qu’extérieures. Le décor d’incrustations de cuivre couvre également tout le coté des anneaux de fer visible comme si il ne s'agissait d'oublier aucun espace.

Entre chaque plaque ont été ajustées douze tabernacles qui représentent les douze portes de la Jérusalem céleste. Ces ouvrages de prés de 130 centimètres sont également le fruit d'un travail minutieux  avec une recherche évidente du détail. Certaines sont couvertes d'une coupole presque orientale. D'autres au deux étages entourées de pinacles et de colonnes. Elles alternent des formes rondes et carrées. Chacune est gardées par des personnages; saints, religieux . Toutes les portes et les fenêtres de tours sont ainsi "habitées".




L'orfèvre ou le commanditaire de l'oeuvre se sont efforcés donner le plus grand luxe à chaque détail de cet objet exceptionnel. Ainsi en témoigne le souci de traiter de manière distincte chaque partie du lustre. La base des portes , qui est aussi la plus visible quand le lustre est suspendu, à reçu ainsi un décor minutieux et chaque fois différent, d'entrelacs de feuillages ou d’animaux finement exécutés et d'une grande précision; le style de ces décor trahi déjà une influence gothique.



Entre chaque portes et aux douze points de fixations du lustre sont sertis douze médaillons. Au centre de chaque médaillons la représentation des apôtres dans une position de sanctification la plupart déroulant un phylactère. Ils sont les assises  de la ville du texte de Jean ; Ils sont évidement les assises de l'Eglise dont la Jérusalem Céleste est une représentation symbolique. Chaque médaillon à reçu un traitement aussi soigné et raffiné que les autres partie de l'ouvrage mais curieusement les apôtres n'y sont pas nommés.


L'on pourrait passer des heure à détailler chaque ornement de la couronne principale faite de cuivre et d'argent, véritable dentelle d'orfèvrerie.Le cercle principal est divisé en 5 bandeaux. La partie centrale est la plus travaillée; faite de métal finement ajourée elle développe une frise de rinceaux de feuillages avec des animaux des personnages, des chevaliers affrontées, parfois des animaux musiciens. Elle est entourée de deux lignes d'un texte en latin dont je n'ai pas la traduction mais qui serait une dédicace en l'honneur du commanditaire ce cette oeuvre, un certain Hartwig. A chaque extrémité de cette couronne deux nouvelle frise de feuillages, plus répétitif que le bandeau central. En partie supérieure enfin se dégage une ligne de feuilles de chênes et de fleur de lys qui supportent les 48 bougeoirs qui illumine encore l'église lors des grands événements religieux.



Cette oeuvre quasi unique et d'une immense valeur artistique et symbolique peut être datée de la fin du XII ème siècle et est a peu prés contemporaine du lustre d'Aix-La-Chapelle datée de 1180. Seul le lustre de Hildesheim est plus ancien mais il a été bien plus restauré que celui de Combourg.

Je terminerais enfin ce long billet par le souvenir de la forte émotion ressentie dans ce lieu magnifique et si peu connu et décrit. Merveille de l'art qui combine avec perfection les styles qui paraissent les plus contraires, comme l'art roman et l'art baroque. Forteresse imposante et majestueuse mais presque ignorée des foules de touristes qui envahissent certains monastères sans regarder autour d'eux. L'abbaye de Combourg conserve aussi de fabuleux trésors de l'art médiéval et une longue et patiente visite n'en épuise nullement la richesse. J'aurais enfin une pensée pour le gardien du lieu qui m'a ouvert les portes de ce sanctuaire pour moi seul avec courtoise et une gentillesse si propre à nos amis allemands et dont beaucoup de lieux de visite pourraient s'inspirer en particulier en France...





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