dimanche 7 novembre 2021

Route d'automne: le beau Dieu noir.

 


On découvre cette statue actuellement dans la nef de la cathédrale de Saint-Flour, ce n’est pas son emplacement d’origine et il semble qu’il ait encore récemment changé de place.

C’est un grand Christ en bois d’une hauteur de plus d’un 1, m90 qui trône au centre de la nef, hiératique et solennel, grave et serein, la sculpture est exceptionnelle et admirablement conservée sans doute l’un des sommets de la sculpture romane sur bois. Elle confirme  l’étonnante vitalité des artistes de cette région du centre de la France à cette époque.

Mais ce Christ est trop beau pour être vrai !

En effet son authenticité fait l’objet d’un incroyable débat entre historiens, chercheurs sommités locales et autres membres de sociétés savantes. Ce que relate avec truculence dans un article paru dans Cantal Patrimoine, Pierre Moulier. Je ne voudrais pas paraphraser l’auteur mais il semble finalement que la sculpture est trop parfaite pour être authentique, nécessairement il ne peut s’agir que d’une copie du XIXe avec pour modèle d’autres Christs de la région en particulier celui d’Auzon.

Noël Graveline dans son ouvrage : « les trésors de l’Auvergne romane » indique que la statue était sans doute située au milieu du jubé de la cathédrale qui a été détruit en 1851. C’est de cette époque que date une modification majeure sa couleur noire et uniforme presque cirée. Il est difficile de comprendre pourquoi il a ainsi été badigeonné de noir;  sans doute un écho au culte des vierges noires ce qui est un autre sujet.

Depuis cette date, l’œuvre fascine et excite les polémiques qui ne cesseront pas avec son classement au titre des monuments historiques en 1908.Come pour le Christ de Montsalvy on l'attribuera alors au XVe siècle.

Le Christ pose beaucoup de questions ; il est en trop bon état, et, compte tenu de sa majesté il n’a pas pu échapper à la furie des révolutionnaires. On ne connaît pas réellement son origine ni sa provenance ce qui plaide en faveur d'une copie. Enfin pour certains, le visage du Christ ressemblerait étrangement à celui de Napoléon III !

Les études au scanner, engagées à l’initiative de la Drac de l’Auvergne, ont parlé et confirment l’avis de l’observateur pertinent et éclairé qu’est Pierre Moulier. Le Christ de Saint-Flour est une œuvre de la  fin du XIIe peut-être du tout début du XIIIe. Il appartient à un vaste ensemble de sculptures sur bois dans cette région du Cantal et de la Haute-Loire qui se s'apparente à une même famille d'œuvre reconnaissables par leur style et leur composition. Et surtout il s'agit bien d'œuvres romanes !

les  passionnantes recherches des historiennes Marie-Blanche Potte, Dominique Faunières, Agnés Blossier et Lucretia Kargère , élargit encore notre horizon de découvertes; « Etudes menées sur les sculptures d’Auvergne en bois polychromé ». Elles confirment la datation à la même époque, à la fois du Christ de Saint-Flour et de celui de Montsalvy. Mais encore, le Christ de Saint-Flour est également une cache à reliques qui n’avait pas été décelée et qui était dissimulée dans le torse de la sculpture. Les chercheuses ont également tenté de restituer la polychromie originale du Christ de Saint-Flour. L’article  avec sa belle bibliographie est en lien, comme l’article de Pierre Moulier.

Je serais tenté de penser comme Pierre Moulier, que « Fascinée par la technologie, notre époque ne croit pas aux analyses stylistiques et je jure que par la science… ». Il faut cependant reconnaitre les immenses progrès apportés l’archéologie, qui, en moins d’un siècle a considérablement modifié les perspectives et notre compréhension de l’art roman.

Et que l’on se rassure l’émotion que l’on ressent devant de telles merveilles de l’art, n’est en rien ternie par l’élargissement du champ de nos connaissances scientifiques. Et puis il reste aussi une part au rêve et à la légende.

Il existait un autre Christ ;  que Jean Anglade évoque dans un livre sur l’Auvergne de jadis, c'etait un Christ en bronze qui se trouvait sur la place d’armes de Saint-Flour et qui a disparu. Le Christ avait le flan percé pour rappeler son supplice, et la légende dit qu'il en sortait un son lugubre lorsque le vent s’y engouffrait. Ce Christ était appelé le « bon Dieu de Saint-Flour ».


http://www.cantalpatrimoine.fr/2017/12/22/lauthenticite-discutee-du-christ-noir-de-saint-flour/?fbclid=IwAR2wzpIBMMvpjGbOEmaHBOA-yeOc1-2b9xx2WoKeFpzSGoUr_Kf-XRkupxc

https://journals.openedition.org/medievalista/2333?fbclid=IwAR3x5xOQF6gPTIe47o4yXV6BZ4F9NCR0SyUbPhey1DTBXm0yMS2_qQ59R1c

3 commentaires:

  1. Cantalou d'origine et tres sensible a l'art roman etca vos rubriques, je découvre avec étonnement cette sculpture médiévale majeure, dans mon propre département et dont j'ignorais l'authenticité. Visite a programmer dès que possible! Merci.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je suis très heureux de ce partage alors, ce Christ avec celui d'Auzon est en effet un des plus beau de la région.

      Supprimer
  2. Je suis unanime , mais le christ d'Auzon reste le plus beau des christs roman

    RépondreSupprimer